le mercredi 14 juin
Un mois à Bordeaux, pour le travail, moto sur place. C’est passé si vite, l’air de rien, mais ce fut difficile. J’ai trop travaillé, pendant une quinzaine de jours j’ai passé mes soirées à faire marcher un truc pour un autre client, en plus de la journée. Je suis tombé malade pendant le seul week-end où j’aurais pu aller voir l’Atlantique, mes copains encore sur place étaient difficiles à voir pendant mes quelques soirées libres. N n’était pas libre pour aller faire un peu de circuit. J’y pense comme ça : beaucoup de déception, il n’y a personne à blâmer. J’ai seulement pu retrouver quelques sensations liées à la moto ; et les trajets en train.
Entre, quelques jours à Marseille chez mon oncle et une soirée avec M, avant de rentrer à Paris, puis Bordeaux. La mer étalant ses bleus, et si froide aussi. Marseille m’a paru une drôle de ville, une agglomération de petites villes, c’est cette impression qui m’a marqué : le sentiment d’être dans une petite ville dont on ne voit jamais la limite si ce n’est la mer ou les montagnes. Mais il y a des quartiers moins drôles que ceux que j’ai vus.
Pendant tout le reste du mois de mai je suis resté pris dans une tristesse tenace, sans pouvoir y échapper. La solitude est revenue s’exercer précise et tranchante, sous sa forme isolante. Depuis D cela fait deux ans, je n’ai connu personne depuis. Je n’y arrive pas, je ne sens jamais les prémices de cette magie où cela va de soi ; et même si, j’ai le sentiment profond que de toute manière je ne saurai pas aller de soi.
La mise à distance. J’aurais voulu que quelqu’un me prenne simplement dans ses bras comme ça, surtout sans que j’aie à le dire parce que ça ça ne peut se réclamer, parce que parfois dans la vie rien ne fonctionne quand on ne devine pas, quand on n’est pas deviné, mais personne absolument personne n’a eu ce geste aussi simple. Je suis entouré quand il le faut vraiment, mais il aurait fallu que quelqu’un me prenne dans ses bras sans rien dire, parce que c’est intenable une vie sans refuge.
Le sentiment est là, de n’avoir pas été habitué aux gestes de tendresse, de n’avoir pas appris à les donner et à les recevoir, d’avoir manqué d’amour lorsque vingt ans brûlent, et avant, et de le payer toujours plus cher au fur et à mesure que le temps passe et ne reviendra plus.